Abel Nguéndé Goumba

Publié le par taka parler

Abel Goumba
Abel Goumba

Abel Nguéndé Goumba, né le 18 septembre 1926 à Grimari (préfecture de la Ouaka) et décédé le 11 mai 2009 à Bangui, est un docteur en médecine, agrégé de médecine de santé publique et homme politique centrafricain, ancien Premier ministre à deux reprises (1959 et 2003) et ancien vice-président de la République centrafricaine de 12 décembre 2003 à 14 mars 2005.

Il commence sa carrière politique pendant la colonisation française, accédant au poste de vice-président du conseil entre 1957 et 1958 avant de devenir président du conseil, puis Premier ministre en 1959 après la mort accidentelle de Barthélemy Boganda. À la veille de l'indépendance, il est farouchement combattu par l'administration coloniale et les anciens ennemis de Boganda qui ont repris du service. Ils s'appuieront sur David Dacko, plus malléable pour l'écarter de la succession naturelle de Boganda. Devenu orphelin de son mentor politique Boganga, Goumba qui représente l'aile nationaliste et panafricaniste du MESAN (Mouvement d'évolution sociale de l'Afrique noire - Parti de Boganda) rentre en opposition au nouveau pouvoir entre 1960 et 1964, il connaitra plusieurs fois : prison, déportation, procès… Il part en exil forcé en 1964. Exil qui le conduira en France où il fait un doctorat de médecine puis une agrégation, puis au Rwanda, Zaïre, Bénin soit comme fonctionnaire international de l'OMS ou comme enseignant de santé publique à l'Université...

Il revint en Centrafrique au début des années 1980 pour continuer sa carrière politique. Il se présenta à cinq reprises à l'élection présidentielle, et réalisa son meilleur score pendant celle de 1993 lors de laquelle il obtint plus de 20 % des voix au premier tour. Il fut battu au second tour par Ange-Félix Patassé. Goumba s'opposa périodiquement au président Ange-Félix Patassé sans jamais parvenir à regrouper l'opposition sous son nom.

Goumba est nommé Premier ministre le 23 mars 2003, après le coup d'État du 15 mars du général François Bozizé qui évince Patassé. Le12 décembre 2003, il accède à la fonction de vice-président nommé par le président Bozizé. Il est remplacé par Célestin Gaombalet au poste de Premier ministre.

Abel Goumba était candidat à l'élection présidentielle du 13 mars 2005 et n'y reçoit que 2,5 % des voix. Peu après le premier tour, le président Bozizé démet Goumba de la vice-présidence et abolit cette fonction lors de la fondation de la VIe République. Au même moment, sa femme, Anne-Marie Goumba est élue députée de Bangui sous l'étiquette du Front patriotique pour le progrès.

Le 12 mars 2006, son fils Alexandre Goumba (49 ans), directeur des opérations à la Commercial Bank de Centrafrique (CBCA) est élu à la tête d'une frange de son parti le Front patriotique pour le progrès (FPP) ayant fait sécession, par acclamation des militants à la présidence du comité central du parti, au terme d'un Congrès Extraordinaire. L'autre frange est dirigée par Moïse Kotayé, lui aussi, élu au terme d'un congrès.

Le 30 avril 2009 lors de la présentation du 2e tome de ses mémoires de plus de 700 pages à Bangui, Abel Goumba avait accepté publiquement suite aux demandes incessantes des militants et nombreux amis, d'user de toute son influence morale afin d'aider les deux tendances de son parti à s'unir pour trouver un leader de consensus. Il faut dire qu'Abel Goumba n'a jamais soutenu "publiquement" un camp au détriment de l'autre, en s'appuyant sur ce que Staline a fait de l'héritage de Lénine, sachant que c'est ce dernier qui l'avait désigné de son vivant.

Il meurt le 11 mai 2009 dans une clinique de Bangui à l'âge de 82 ans.

Abel Nguéndé Goumba

Témoignage Unique

Les Mémoires et les Réflexions politiques du Professeur Abel GOUMBA

Premier volume des Mémoires du président Abel Goumba, publiées sous le titre : « Les Mémoires & les Réflexions politiques du Résistant anti-colonial, démocrate et militant Panafricaniste, Abel Goumba »

Témoignage unique est, en effet, l’épithète qui sied bien au premier volume des Mémoires du président Abel Goumba, publiées sous le titre : « Les Mémoires & les Réflexions politiques du Résistant anti-colonial, démocrate et militant Panafricaniste, Abel Goumba » par l’éditeur CCINIA Communication, préfacées par le professeur Théophile Obenga et postfacées par Henda Diogène Senny. Livre de 374 pages, illustré d’annexes authentiques, il est vendu à 33 €.

Militant anti-colonial et démocrate

Témoignage unique, car le président Abel Goumba, dès 1957, soit à l’âge de 31 ans, à l’entrée de l’application de la loi-cadre, dirigeait le premier gouvernement oubanguien comme l’ont été à la même époque, Gabriel Lusette au Tchad, Jacques Opangault au Moyen-Congo, Léon Mba au Gabon... ; de tous ces homologues, pour des raisons diverses, le président Abel Goumba est le seul à avoir écrit de son vivant et de ses mains ces Mémoires politiques, s’exposant ainsi à la critique et surtout au sévère jugement humain souvent subjectif tant les événements abordés touchent les aspects les plus douleureux de l’Histoire africaine. D’ailleurs, cela peut être étendu à l’ensemble des dirigeants et leaders de l’époque des indépendances car ni l’abbé Fulbert Youlou, ni l’abbé Barthélemy Boganda, ni David Dacko, Ni Patrice Lumumba, ni Ruben Um Nyobé, tous ou presque, aucun n’a laissé, même à titre posthume, ses mémoires sur cette période importante de l’Histoire de l’Afrique noire.

Militant anti-colonial d’abord, puis opposant historique durant 40 ans à toutes les dictatures qui ont sévi en Centrafrique, le président Abel Goumba, donne d’entrée le ton général de son ouvrage, comme on peut lire en page 14 :

« Ayant été l’un des principaux artisans de la lutte pour l’indépendance réelle de la RCA à côté de Boganda, ma conscience de nationaliste, de patriote engagé, membre de la fraction de l’élite intellectuelle la plus désintéressée matériellement, dévoué et responsable, me faisait un devoir de prendre la voie du sacrifice que représente le périlleux risque de toucher aux intérêts de la puissance coloniale, opposés aux intérêts de mon pays, le périlleux risque de m’attaquer à ses protégés locaux, mes propres compatriotes qui, volontairement ou par ignorance, se conduisent en véritables traîtres contre la prospérité et le bonheur de nos populations, préoccupés qu’ils sont avant tout par la sauvegarde de leurs intérêts personnels, par leur "ko bè ti yanga" (en langue locale "Sango" : pain quotidien), sans aucune conscience nationale. Les conséquences de cette attitude ne devaient pas tarder à se faire sentir. »

Cette publication exceptionnelle vient rompre le silence incompréhensible, pour ne pas dire honteux, des dirigeants de l’Afrique noire au moment où un vent de révisionnisme colonial règne entre l’Afrique et la France, matérialisé par l’adoption au parlement français de la loi reconnaissant les effets positifs de la Colonisation. Elle rejoint aussi la sortie véhémente contre ladite loi, heureusement retirée, de l’auteur du « Discours sur le Colonialisme », Aimé Césaire.

Témoignage unique encore, car en sa qualité de collaborateur immédiat du président Barthélemy Boganda, il nous livre avec rigueur et probité intellectuelle, la situation cocasse sur fond de superstition ayant présidé à la succession de Barthélemy Boganda à la suite de sa disparition tragique dans un accident d’avion non élucidé à ce jour ; le rôle néfaste de l’Église, celui de la franc-maçonnerie qui venait de s’implanter et de l’administration coloniale (la chambre de commerce de Bangui en particulier) en cette époque de décolonisation.

Et là aussi, avec l’un des protagonistes à la succession de Boganda, le président Abel Goumba, écrit :

« P. 14 : Devant le mécontentement toujours grandissant de la population, Dacko, qui n’avait plus d’autre programme politique, économique et socioculturel que celui dicté par ses tuteurs colonialistes de l’administration et les colons du secteur privé, coiffé qu’il était par les tout puissants maîtres francs-maçons locaux, a naturellement sauté sur la solution de facilité qui consiste à rendre l’opposition responsable de la situation déplorable du pays.
(...)
P. 15 : Dacko entreprit alors l’œuvre traîtresse inconsciente de destruction et de démolition politique, économique et sociale de la RCA pour en faire finalement un pays pauvre, néo-colonisé, à la traîne des autres pays africains, devenant ainsi le ventre mou de l’Afrique, en dépit de ses immenses ressou
rces naturelles. »

Militant panafricaniste

Témoignage unique aussi, car le président Abel Goumba est de ceux qui, au nom de l’Oubangui-Chari, ont participé aux côtés de Sédar Senghor, de Sékou Touré, de Houphouët-Boigny, et de tant d’autres, en février 1958 à Paris, à l’événement historique rassemblant tous les dirigeants africains et leurs opposants en vue de jeter les bases de l’Unité africaine. Il nous livre pour la première fois, le déroulement des débats avec force détails. C’est à l’issue de cette rencontre que le PRA (Parti du Regroupement Africain) fut créé.

Il rapporte aussi les faits qui se sont déroulés au premier congrès du PRA, les 25, 26 et 27 juillet 1958 à Cotonou (Dahomey). Malheureusement, cette organisation qui aurait servi de prélude à l’Unité africaine fut boycottée par Houphouët-Boigny et ses compagnons du RDA.

Guerre civile du Congo-Brazzaville de février 1959

Enfin, témoignage unique, pourrait-on dire encore, dans la mesure où le président Abel Goumba, avec une vision extérieure, a consacré dans ces Mémoires, un chapitre sur les malheureux événements sanglants de février 1959 du Congo-Brazzaville opposant les partisans de l’abbé Fulbert Youlou à ceux de Jacques Opangault dont il fut témoin sur fond de contradiction par ailleurs entre les deux abbés Boganda et Youlou. Evénements considérés par d’aucuns, à tort et à travers, comme le déterminisme politique servant d’antécédent historique aux conflits successifs qui ont endeuillé le Congo-Brazzaville.

L’hommage du Congo-Brazzaville au président Abel Goumba

Avant de rejoindre officiellement les rangs du MESAN (Mouvement d’évolution sociale en Afrique noire) de Barthélemy Boganda, le président Abel Goumba, avait commencé sa carrière professionnelle, en tant que jeune médecin au Moyen-Congo, d’abord au Nord à Makoua de 1950 à 1954, puis au Sud à Dolisie de 1954 à 1956.

Le Congo rend hommage au combattant centrafricain : les auteurs de la préface et de la postface, ainsi que l’éditeur entourent le président Abel Goumba.

Coïncidence ou pas, les énergies et les personnalités impliquées afin de rendre possibles l’édition, la publication et la présentation de cette œuvre incontestablement panafricaine, sonnent aussi comme un hommage mérité du Congo-Brazzaville au président Abel Goumba. Car l’éditeur, CCINIA Communication, représenté par le pasteur Shébuel Mowhou, l’auteur de la préface, le professeur Théophile Obenga et moi-même, auteur de la post-face, sont tous Congolais.

Conclusion

Le premier volume des Mémoires politiques du président Abel Goumba contribuera, à n’en point douter, à l’éveil de la conscience historique et politique des nouvelles générations africaines. Travail beau, exposé complet et multiforme, tel un historien, il analyse et dépeint le système colonial (travail forcé, code de l’indigénat, économie de traite, imposition de la monoculture, résistance anti-coloniale des Africains illustrée par la guerre de kongo-wara...), la loi-cadre et ses limites liées à un bicéphalisme inadapté ; les compromissions de ses propres compatriotes avec l’ancien maître sacrifiant ainsi les acquis de l’indépendance, tout comme il met à nu les dirigeants africains qui ont sapé les bases de l’unité africaine.

Le président Abel Goumba, ne fait pas seulement un descriptif froid des événements comme dans un compte d’épiciers, au contraire, il prend position lui-même, assume ses choix, les argumente sans vouloir les imposer comme vérité absolue. Son ambition profonde reste avant tout l’ouverture du débat contradictoire qu’il appelle de ses vœux.

Que les nouvelles générations africaines accueillent cette œuvre avec la ferveur panafricaine.

Henda Diogène SENNY

Auteur de la post-face de l’ouvrage : « Les Mémoires et Réflexions politiques du Résistant anti-colonial, démocrate et militant panafricaniste, Abel Goumba »

Publié dans Kota Zo LA

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