LA PROBLEMATIQUE DE LA DETTE PUBLIQUE DANS LES PAYS LES MOINS AVANCES (PMA): CAS DE LA RÉPUBLIQUE CENTRAFRICAINE

Publié le par TAKA PARLER

Sedar Fred Pougaza
Sedar Fred Pougaza

Bien qu’étant une nécessité au lendemain de leur accession à l’indépendance, la dette publique des pays les moins développés socio-économiquement de la planète en générale et de la République Centrafricaine en particulier, se présente aujourd’hui comme la contrainte majeure à leur développement. Le constat est qu’après avoir été un instrument au service de la croissance, la dette publique est aujourd’hui et surtout une contrainte majeure au développement économique. L’approche keynésienne est que la dette publique ne peut pas être considérée et traitée comme si elle était la même que la dette privée. En particulier, il n'est pas vrai que la dette publique doit être nécessairement éteinte mais cela est possible. Quel est le bilan de la gestion de la dette en République CentrafrIcaine et comment envisager les perspectives d'avenir?

De facon simplifiée, la dette signifie ce qu’on doit à quelqu’un ou la somme d’argent qu’on doit. La dette publique est la dette de l'Etat. En matière de finance, la dette publique désigne l’ensemble des sommes dues par l’Etat. La dette extérieure; quant à elle; est l’ensemble des dettes d’un pays à l’égard de l’étranger. En fonction des sources de crédits, la dette publique est subdivisée en une dette commerciale et une aide publique au développement. La dette commerciale est composée des crédits fournisseurs, des emprunts obligataires et des crédits accordés par les établissements financiers privés. L’aide publique au développement est constituée par les crédits accordés par les organismes internationaux et les gouvernements ou les institutions publiques. Il faudrait aussi noter qu’il y a une distinction entre l’engagement et l’encours. Les engagements sont des crédits non mobilisés. Ils correspondent aux sommes des contrats et des conventions signés durant une période donnée. Les encours sont le résultat de la somme des tirages de la période c'est-à-dire des emprunts financièrement realisés diminués de la somme des remboursements de capital effectués. Le service de la dette correspond à l’ensemble des montants qu’un emprunteur doit payer chaque année pour honorer sa dette, qu’il s’agisse des intérêts ou du remboursement du capital emprunté. Elle est différente de la charge de la dette qui, elle, ne tient compte que des intérêts annuels déboursés.

A partir de 1980, l'endettement extérieur considéré jadis comme le recours indispensable pour le financement adéquat de leur développement, apparait comme le principal obstacle au décollage économique des pays les moins avancés (PMA) dans leur ensemble et plus particulièrement des pays ACP (Afrique, Caraïbes et Pacifique) comme la République Centrafricaine. Dans le cas de la République Centrafricaine, l’encours de la dette publique du pays s’élève à 450 milliards de francs CFA (soit 765 millions de dollar Américain) au 15 juillet 2016. Cet encours est de 173,07% du produit intérieur brut (PIB). En l’an 2016, le service de la dette représente environ 60% des recettes fiscales. En 2014 la dette publique qui était de 1,179 millions de dollar Américain, représentait 68.34% du PIB. Il est bien de s’adresser aux défis post conflit en Centrafrique. Il est bien de donner priorité à la cohésion sociale et à la paix pour remettre le pays sur les rails. Mais il faudrait aussi combiner à ces actions avec la question épineuse de l’endettement car la forte pression sur le budget de l’état centrafricain (le montant du budget est estime 260 milliards de francs CFA soit 442 millions de dollar Americain) réduit considérablement le taux d’investissement et donc les possibilités de création de richesse et de mobilisation de l’épargne locale.

Cette spirale d’endettement est due à des causes tant internes qu’externes ayant aggravées le niveau d’endettement de la République Centrafricaine.

Au plan interne, on note les raisons comme l’absence de stratégie optimale d’endettement , ou d’insuffisance de gouvernance (le manque de volonté politique clairement exprimée par les régimes qui se sont succedés en République Centrafricaine sur la question de la dette). Au plan externe, elle est due à des chocs exogènes comme la détérioration des termes de l’échange ou l’instabilité (les fluctuations) des taux d’intérêts. Par ailleurs, il faudrait relever l’échec des différentes tentatives de réechelonnement et des initiatives pour l’allègement du poids de la dette; l’échec des programmes d’ajustements structurels (PAS), et l’absence d’engagement véritable de l’Union Européenne dans la gestion de la dette de la République Centrafricaine.

Sur la base de ce constat, j’estime qu’une annulation pure et simple de la dette contractée auprès de Banque Européenne d’Investissement (BEI) s’impose. Cette option est soutenue par les arguments suivants: En raison du fardeau de la dette, le taux d’investissement baisse. Ce qui compromet la croissance et aménuise les opportunités de création de richesses et donc de génération d’épargne; La forte pression de la dette sur le budget oblige également l’état centrafricain à renoncer à certains investissements de base. Ce qui entraine l’instabilité sociale et politique. Les statistiques et les ratios relatifs à l’encours et au service de la dette par rapport aux possibilités de remboursement témoignent également de l’intensité de la contrainte. La seconde option qui est une sorte de solution alternative est que je propose un moratoire de remboursement long pour permettre à l’économie Centrafricaine de reconstituer son potentiel de production en vue de créer de nouvelles richesses; Aussi, il convient d’indexer le service de la dette aux performances de l’économie centrafricaine (Termes de l’échange, capacité de mobilisation des ressources internes). Un autre moyen qui pourrait être le plus sûr est de renégocier les termes de la dette. Beaucoup de pays le font chaque fois. Cela permet de refinancer la dette avec des taux d’interets plus favorables pour réduire la dette. Des mesures d’accompagnement comme la mise en place des mécanismes d’information en matiere de gestion de la dette entre l’Etat et la société civile; la mise en place d’une véritable stratégie de gestion de la dette avec l’implication de la société dans toutes ses composantes et à toutes les étapes du processus de négociation et de gestion de la dette; le renforcement des capacités en matière de gestion de la dette; la mise en place d’une structure au niveau national de gestion et de suivi de la dette; et l’assainissement du cadre macro-économique ne sont pas aussi à négliger. Je recommande en outre l’implication de la societe civile dans toutes ses composantes à la gestion de la dette publique, une volonte politique clairement exprimée au niveau de la République Centrafricaine, une implication effective de l’Union Européenne à la gestion de la dette multilatérale, et une offensive concentrée de la République Centrafricaine sur la question de la dette à l’horizon 2020.

En conclusion, j’estime que la dette publique constitue aujourd’hui l’obstacle majeur au développement économique et social de la République Centrafricaine. Par conséquent, si une solution radicale n’est pas trouvée au problème de la dette, la République Centrafricaine sera encore plus affaiblie et plus marginalisée à l’horizon 2020. La prise en compte de ces reflexions contribuera de facon significative à la résolution de la crise de la dette publique dans cette partie du monde. Il est possible de stabiliser le ratio de la dette publique au PIB, même si le gouvernement gère les déficits primaires. Ce résultat est obtenu en choisissant une composition des dépenses publiques associées à un taux de croissance plus supérieur au taux d'intérêt sur la dette publique. Cette analyse est essentiellement basée sur l'idée que les dépenses publiques peuvent être décomposées en deux composantes: les dépenses «productives», qui affectent positivement et directement le taux de croissance de l'économie; et les dépenses «improductives», qui ne touchent pas le taux de croissance directement. La situation en matière de la dette publique en République Centrafrique est impérieuse voire pressante et doit être sérieusement prise en compte avant qu'il ne soit trop tard.

Face aux orientations en matière d’appui à l’allègement de la dette des Etats membres du Groupe des Etats d´Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP), quelle est réellement la réaction de la partie centrafricaine? Si les tendances actuelles au niveau des ratios de la dette se poursuivent, quel va être le sort des générations futures? Comment améliorer les ratios dette/exportations, dette/Produit Intérieur Brut (PIB)?

Par Sedar Fred Pougaza, économiste, enseignant et chercheur indépendant. Etats-Unis d'Amérique

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T
Cela ne nous dédouane pas de la situation de notre niveau d'endettement de l'après atteinte du point d'achèvement de l'initiative PPTE en 2008. Nous avons fait un effort (mesures structurelles) récompensé par l'effacement d'une partie importante de la dette publique. Notre capacité d'emprunt, de solvabilité et en bout de course de crédibilité financière ont été accrues et devait nous permettre d'avoir accès à des ressources pour des investissements productifs et le développement tout court. Au lieu de cela, nous nous sommes enfermer dans des emprunts pour payer le salaire et le fonctionnement de l'Etat (consommation). Nous avons dilapider cet capital de confiance précieux que nous avions entre les mains. Cela vous ne pouvez pas le nier. Sur le plan financier quel est le pays ou l'investisseur qui va faire confiance à ce pays aujourd'hui même si son niveau d'endettement ne représente que 34,2% de son PIB après annulation de sa dette ? Ce n'est pas la réunion de Bruxelles où des miettes qui nous serons jetées qui va régler ce problème de fond.
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C
Bonjour compatriote,<br /> <br /> j'ai lu votre votre analyse et me contente de dire que les chiffres utilisée sont éronnés Certainement par manque d'informations. Vous ne disposez pas de suffisamment de statisques sur l'économie centrafricaine. Dans l'hypothèse que l'encours de la dette est votre chiffre, le PIB en 2016 est estimé à1037,2 milliards de FCA. Votre ration n'est pas exact.En regardant les chiffres officiels (FMI et BEAC) le chiffre avancé est celui de 2009 en ce qui concerne la dette extérieure. En 2016 la dette extérieure est 191,3 milliards de FCFA. Ce qui donne environ DETTe/PIB en 2016 34,2 %et le service 16,9% par rapport aux recettes budgétaire. ces chiffres ne sont pas alarmants.<br /> Je suis disposé à envoyé toute la documentation sous forme de courrier.
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Z
Les chiffres communiqués peuvent rassurés. Tant mieux. Mais on serait rassuré en donnant plus de détail sur le mode de détermination du PIB. Avec un PIN estimé à 1037,2 milliards de F CFA, on peut dire bravo. Si on s'arrêter à la définition du PIB qui est la somme des valeurs ajoutées qui sont par ailleurs la différence entre la production et les consommations intermédiaires, le pays a bien produit pour pays en crise avec l'appareil productif détruit à plus de 50%. Quel est le secteur qui a boosté cette production? Avec ce niveau de production, on peut payer nos salaires sur nos propres ressources internes! que est le niveau de nos recettes budgétaires hors dons,?
C
Je m'excuse de quelques fautes de frappe. Je n,'ai pas relu mon commentaire
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C
Bonjour compatriote,<br /> <br /> j'ai lu votre votre analyse et me contente de dire que les chiffres utilisée sont éronnés Certainement par manque d'informations. Vous ne disposez pas de suffisamment de statisques sur l'économie centrafricaine. Dans l'hypothèse que l'encours de la dette est votre chiffre, le PIB en 2016 est estimé à1037,2 milliards de FCA. Votre ration n'est pas exact.En regardant les chiffres officiels (FMI et BEAC) le chiffre avancé est celui de 2009 en ce qui concerne la dette extérieure. En 2016 la dette extérieure est 191,3 milliards de FCFA. Ce qui donne environ DETTe/PIB en 2016 34,2 %et le service 16,9% par rapport aux recettes budgétaire. ces chiffres ne sont pas alarmants.<br /> Je suis disposé à envoyé toute la documentation sous forme de courrier.
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Z
Espérons que nos nouvelles autorités, notamment le Ministre en Charge des Finances, ont la mesure de la situation. Est-ce que c'est par ignorance ou par obscurantisme que nos dirigeants se sont mis à s'endetter pour consommer au lieu d'investir dans les secteurs productifs? Pourquoi nos dirigeants ne confient pas ces choses à ceux qui maîtrisent ce sujet? L'économie est une science. C'est là où 1+1 est bien égal à 2. On ne triche pas avec car cela finit par nous tomber dessus.Avec un tel handicap, on parie fort que les aides ne viendront pas en masse du fait notre incapacité à rembourser le service de la dette (k+intérêts). Doit-on continuer à fermer les yeux sur la gabegie organisée par ceux qui nous gouvernent? Espérons que cette fois-ci, on fera confiance à ceux connaissent.
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