BANGUI : LA MAIRIE DÉFIGURE LA VILLE ET DILAPIDE HONTEUSEMENT LE PATRIMOINE COMMUN
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Le visage ignoble, indécent voire même franchement hideux de la ville de Bangui est à l’image de la gestion calamiteuse de l’actuelle maire. Ce qui rappelle malheureusement l’amateurisme, l’appât de gain et le dessein de se remplir les poches au détriment de la majorité et au préjudice de l’intérêt général qui caractérisent la transition chancelante, s’achevant le 31 mars prochain.
Décidément, tout se passe comme si la tête des autorités municipales, la présidente de la délégation de la ville de Bangui en tête, est un véritable désert. C’est à croire que leur jugeote tiendrait à peine dans un dé à coudre. Pis, même quand on choisit, simplement par dépit ou carrément dans un élan de révolte de les ignorer (parce que ces autorités municipales ne méritent pas le détour), il faudrait forcément que leurs agissements viennent nous rappeler que nous avons affaire à des gens qui marchent sur la tête. Et que rien, absolument rien, dans ce que ces dirigeants de la transition ont eu à accomplir ne leur a prêté un soupçon de relief. Bien au contraire.
En effet, lorsque l’on parcours le rivage du fleuve Oubangui à l’endroit où était situé Bangui-Plage, l’on constate un alignement de tôles en aluminium constituant une clôture qui indique l’imminence du démarrage des travaux de construction d’un ouvrage architectural. Ce qui défigure davantage le visage déjà moche, laminée de la ville de Bangui, jadis la coquette, ville de pari, qui ressemble aujourd’hui à s’y méprendre à un dépotoir, tant les immondices jonchent les artères même dans le centre administratif.
Renseignement pris, madame le maire aurait décidé de vendre tout le littoral du fleuve Oubangui au Libanais de CCCG, propriétaire de la compagnie aérienne Karinou, qui envisagerait d’y construire un hôtel. S’il ne s’agissait pas du rivage du fleuve Oubangui, un domaine public, on aurait applaudi ce projet à deux mains. Car il s’agirait là, d’une entreprise destinée à transformer positivement le visage de notre coquette capitale. Loin de nous l’idée d’une croisade contre les investisseurs ou les investissements qui pourraient créer des emplois et faire tourner l’économie du pays. Mais il y a certains projets qui portent en eux le message funeste de la destruction pure et simple du patrimoine commun.
D’autant que nul n’a le droit de privatiser dans le seul dessein de s’enrichir le domaine public. Surtout pas à cet endroit précis de la ville de Bangui qui appartient à tous, même à ceux de nos compatriotes vivant dans les contrées très éloignées et qui ne s’y sont jamais venus. Pour la simple et la bonne raison que le domaine public est le patrimoine de tous les Centrafricains. Nous utilisons bien le mot PATRIMOINE. C’est-à-dire dans notre entendement, l’héritage de nos pères. D’ailleurs, la ville de Bangui a une histoire centenaire que nous sommes tenus de léguer à nos enfants et petits-enfants. Il est impératif que chaque Centrafricains ait en tête les grands repères historiques, culturels et architecturaux qui lui rappelle d’où il vient. Dans ces conditions, la République a le devoir absolu de transmettre ce patrimoine avec l’ensemble des éléments expliquant son cheminement avec une chronologie précise aux générations présentes et à venir.
Comment nos enfants ou demain nos petits enfants, voire même les nouveaux arrivants comprendraient-ils notre histoire s’ils n’ont pas la moindre connaissance de notre patrimoine commun ?
À preuve, dans les pays côtiers tels que le Sénégal ou le Togo, pour ne citer que ces deux États, le domaine littoral est jalousement préservé, mis en valeur. Les mairies de Dakar ou de Lomé rentabilisent les rivages de leur ville par des projets structurants dans le domaine touristique, avec des animations hebdomadaires attirant les consommateurs. Pourquoi la mairie de Bangui ne suivrait-elle pas ces exemples plutôt que de dilapider le PATRIMOINE des Centrafricains en les cédant à vile prix aux étrangers.
Au-delà de la faute de la mairie de Bangui, qui aurait cédé ce patrimoine collectif contre des espèces sonnantes et trébuchantes, nous sommes devant un cas flagrant du cruel manque de vision que l’on reproche souvent à ceux qui ont la fâcheuse prétention d’agir à notre place. Nos soi-disant dirigeants auraient pu par exemple proposer un terrain en dehors de la ville pour la mise en oeuvre d’un tel projet. Ce qui aurait eu l’avantage d’accélérer l’idée de la création du « Nouveau-Bangui ». Une nouvelle ville à côté de l’actuelle Bangui avec un centre administratif digne de ce nom et des attractions qui contribueraient au développement du pays. Ce ne sont pas les espaces qui manquent dans ce pays de 623 mille kilomètres carrés.
C’est pourquoi, très vite, les nouvelles autorités élues devaient dénoncer ces arrangements foireux, annuler ces ventes afin de restituer les espaces au domaine public et, surtout, initier des projets pour les mettre en valeur.
SERGE KOYT